Délicieuses pourritures de Joyce Carol OATES
- Poche: 125 pages
- Editeur : J'ai lu (6 octobre 2005)
- Collection : J'ai lu Roman
Le thème : Gillian Brauer, 20 ans, brillante étudiante de troisième année, voudrait briller encore davantage aux yeux de Andre Harrow, son charismatique professeur de littérature, qui, cette
année-là, a créé un atelier de poésie aussi recherché que sélectif. Fatigué des poèmes plus ou moins convenus qu'elles produisent, Harrow décide de faire écrire et lire en classe à ses élèves
leur journal intime, n'octroyant ses compliment qu'aux confessions les plus osées, ce qui provoque surenchères et accidents parmi les élues (anorexie, tentatives de suicide). Car, on s'en
doute, toutes ces demoiselles sont amoureuses de leur professeur qui en joue sans vergogne. Et Gillian est décidée à plaire autant que Harrow à séduire. Une situation classique, mais dont Oates
ne saurait tolérer qu'elle soit ordinaire. La liaison de Gillian avec Andre Harrow n'a donc rien de banal. Très vite, le rôle glauque de la mystérieuse Dorcas, l'épouse -française- d'Andre,
apparaît dans toute sa perversité. Sous le prétexte de recherche d'inspiration artistique, Dorcas utilise les élèves de son époux pour satisfaire ses propres fantasmes. Rapports de domination
dont sont victimes les "stagiaires" plus vulnérables, en général les plus douées intellectuellement.
Gillian succombe mais la morale sera sauve... à la manière impitoyable et toujours inattendue de Madame Oates.
Ce court roman, d'une remarquable densité, on le referme avec un vague sentiment de malaise. Ce qui est, à l'évidence, l'effet recherché par l’auteur, inégalable dans son art de créer une atmosphère étrange: la tension qui règne chez ces filles amoureuses et survoltées (voir leur comportement lors d'incendies multiples et bizarres), toutes souffrant d'un penchant prononcé pour l'autodestruction et l'humiliation; ces totems omniprésents qui donnent corps aux pulsions primitives des personnages; le couple Andre-Dorcas, caricatural, figures parentales perverses; les ébats du couple avec ses stagiaires, plus imaginés, suggérés que décrits et qui n'en ont que plus de force. "Une atmosphère de conte de fées moderne", selon le Los Angeles Times. Oui, mais de fées avec des baguettes magiques trempées dans le curare...
Joyce Carol Oates est née en 1938 à l'ouest du lac Erié. Son père travaillait pour la General Motors. Elle passe une enfance solitaire face à sa soeur autiste et découvre, lorsqu'elle s'installe
à Detroit au début des années 60, la violence des conflits sociaux et raciaux. Devenue professeur de littérature à l'université de Princeton, elle poursuit la plus prolifique des carrières
littéraires (une trentaine de romans mais aussi des essais, des nouvelles, des pièces de théâtre, de la poésie). Elle a figuré deux fois dans la liste des "finalistes" du Prix Nobel de
littérature. Son roman Blonde, publié pratiquement dans le monde entier (et en France en 2000), lui a valu les éloges unanimes de la critique internationale. Mais d'autres titres avaient déjà
fait sa célébrité, dont entre autres: La légende de Bloodsmoor, Bellefleur, Eux, Confessions d'un gang de filles, Corky, Nous étions les Mulvaney. Oates a aussi écrit plusieurs romans policiers
sous le pseudonyme de Rosamond Smith.
Elle est mariée, continue d'enseigner à Princeton où elle vit avec son époux qui dirige une revue littéraire, la Ontario Review.
Mon avis
Cette fois ci, je me suis attaquée à un roman "adulte" de Joyce Carol Oates sur les recommendations d'une de mes collègues. Grand bien lui a pris de me prévenir sur le caractère particulier de ce livre.
Très bien écrit, le thème de ce roman est cependant très particulier. Des étudiantes des années 70 sont sous la main mise de leur professeur de littérature. Afin de lui plaire et d'être dans ses bonnes graces, elles sont prêtes à tout même aux choses les plus extrêmes. Certaines ne s'en remetteront pas. Ce roman psychologique montre la manipulation dont peuvent être vicitimes les esprits les plus faibles et la perversité de l'être humain.